Trans-Forme précurseur du sport-santé
À l’heure où tout le monde parle de sport-santé, des bienfaits de l’activité physique pour les maladies chroniques, du sport sur ordonnance, des chèques santé… Olivier Coustere sourit. Cela fait plus de 30 ans que l’on démontre et prône les bienfaits de la pratique physique et sportive pour les transplantés et les dialysés, et que la pratique d’une activité physique est un premier pas vers une vie « normale » et une qualité de vie retrouvée.
Par CLARISSE NÉNARD
« Depuis 1995 que nous prescrivons l’activité physique comme outil de réhabilitation des personnes greffées ou en attente de greffe, il était vraiment temps d’accepter le sport comme outil de santé. Il y a désormais une vraie prise de conscience. Certes, l ‘exercice physique est peut-être moins important que de prendre ses médicaments à l’heure. Mais il est un formidable moyen de reconquête d’une vie normale. C’est pourquoi il doit être systématiquement recommandé et adapté à chacun. C’est une véritable thérapie auxiliaire, que ce soit en phase pré ou post opératoire. » Président et fondateur de l’Association Trans-Forme, et past President de la World Transplant Games Federation (WTGF), Olivier Coustere n’a pas attendu que le sport-santé devienne à la mode pour faire évoluer les mentalités. « À l’époque, très peu de médecins donnaient leur autorisation parce que c’était l’inconnu. Toutefois, on savait que le sport faisait du bien à la tête. »
De la réhabilitation par l’activité physique…
Si la première délégation française fut envoyée en 1978 aux Jeux Mondiaux des Transplantés de Portsmouth, à l’initiative de Madame de Saint Seine (association UNIR), il fallut attendre la création de Trans-Forme, en 1989, pour que les greffés et dialysés puissent pratiquer leur sport en pleine lumière. « À l’origine, l’idée était de leur faciliter le retour à une certaine qualité de vie. Dans les années 90, notre leitmotiv était : « Merci Donneurs, merci Docteurs, merci Chercheurs… Je suis en vie. Maintenant, je veux vivre. »
À cette époque, il n’était absolument pas évident d’associer le sport aux transplantés et dialysés. Nous étions en plein défrichage. Les transplanteurs n’étaient pas prêts à envoyer « leurs » transplantés faire du sport. » On parlait plutôt de transplantation en terme de survie. De là, à imaginer une association sport et greffe… C’était loin d’être évident.
… aux prérequis médicaux
Tantôt hissé au rang de héros, tantôt pris pour « suicidaire », il a su s’entourer de spécialistes. Les docteurs Jean-Claude Verdier, cardiologue du sport, et Christian d’Auzac, néphrologue, l’ont accompagné dès le début de cette aventure. « Je me souviens que ce dernier m’avait dit : de toutes façons, vous allez faire des « conneries », alors je préfère vous accompagner plutôt que de vous laisser faire tout seul. » Tout au long de sa vie et de celle de Trans-Forme, Olivier Coustere a validé que l’activité physique était positive pour les greffés et les dialysés, qu’elle soit choisie comme objet de vie ou comme outil de réhabilitation.
C’est ainsi qu’en 1992, avec d’autres greffés et dialysés qui souhaitaient se prendre en main, avec des médecins de la transplantation et du sport, il lance un certain nombre de tests et d’analyses. « Il fallait que nous prouvions que l’effort physique n’était pas délétère pour le greffon… au-delà de faire du bien à la tête. C’est pourquoi nous nous sommes prêtés aux analyses d’urines, au souffle dans les tuyaux, aux prises de sang… avant, pendant et après l’effort. Ce qui nous a permis de mettre en place les prérequis médicaux. » Le résultat ? L’activité physique est une thérapie auxiliaire, non optionnelle pour les greffés. « L’exercice physique joue un rôle important. Vous luttez contre le déconditionnement chronique, vous avez moins d’hypertension, de cholestérol, plus de résistance aux effets secondaires des thérapies, sans compter qu’il permet une meilleure vascularisation des artères. Et quel que soit l’âge, on récupère 20 à 30% de capacité fonctionnelle respiratoire au bout de 20 séances de réadaptation à l’effort. » Aujourd’hui, ces prérequis médicaux varient en fonction du coût énergétique de la discipline pratiquée ou de l’organe greffé.
L’activité physique déjà sur ordonnance
S’il demeure encore une certaine réticence, elle est due à l’ignorance. Grâce à Trans-Forme, il existe désormais une vraie bibliographie médicale concernant la pratique de l’activité physique par les transplantés ou les dialysés. Sans compter que d’autres études sont réalisées partout dans le monde. « Celui qui ignorerait qu’un transplanté ou un dialysé puisse pratiquer une activité physique est tout simplement incompétent. » Trois mois après la greffe, on estime que le greffon est généralement stabilisé. À partir de cette période, il est fortement recommandé de passer à la reconquête de son corps au-delà de la kinésithérapie. « Si le cas particulier du greffé ne pose pas de problème, alors le médecin doit lui conseiller de pratiquer une activité physique affinitaire ou tout simplement de bouger, d’aller chercher son pain à pied, de monter les escaliers à pied, etc. Si le patient nécessite une phase de réadaptation à l’effort. À ce moment-là, le médecin appelle Trans-Forme pour que nous puissions le conseiller ou l’envoyer vers un institut habilité à délivrer des sessions ad hoc de réadaptation à l’effort. Et ces programmes de réadaptation sont remboursés par la sécurité sociale. » Cette quête diffère selon les individus. Certains souhaiteront être simplement autonomes dans les activités quotidiennes. D’autres viseront une pratique sportive. « Notre objectif est que le transplanteur questionne le patient : faites-vous du sport ? Pour qu’il entende de la bouche de son médecin que la pratique physique est possible… voire n’est pas une option. Le simple fait que le praticien pose cette question fera son petit bonhomme de chemin dans la tête du patient… »
Trans-Forme va même plus loin !
En 1998 vint la notion de qualité de vie. C’est ainsi que « l’obsession de Trans-Forme et la mienne, en particulier, est de ne pas se limiter à un greffon qui fonctionne, mais de rechercher une qualité de vie multidisciplinaire : le physique, la psychologie, la sexualité, la libido, la maternité ou encore de retrouver un travail. »
Devant le succès grandissant de cette thérapie par l’activité physique, les transplantés et dialysés sont de plus en plus nombreux à vouloir intégrer des structures sportives traditionnelles. D’où les sensibilisations organisées par Trans-Forme pour les éducateurs sportifs des fédérations multisports ou unisport, aux spécificités… et à la normalité de la pratique sportive des transplantés et dialysés. « Pour moi, il n’y a pas de compétence extraordinaire requise pour les éducateurs sportifs. Une journée suffit pour démystifier complètement ce qu’est un transplanté ou un dialysé vis-à-vis de la pratique physique et sportive. Il est évident que, quand il y a une fistule active, on va éviter les disciplines comme l’escalade, le volley-ball, etc. Sinon, avec des tests d’effort et le certificat d’aptitude signé par leur transplanteur ou leur néphrologue, ils sont capables de pratiquer n’importe quel sport dans n’importe quel club. »
Que ce soit en compétition ou en loisir, Trans-Forme sert de caution, d’assurance au sens propre comme au figuré. « Notre « boulot » est de nous assurer que la pratique d’un sport par nos membres, se déroule en toute sécurité. Nous avons donc tout intérêt à ce qu’ils ne stoppent pas leur thérapie ou qu’ils ne prennent aucun produit actif (au risque d’interactions médicamenteuses fâcheuses), ce dans le seul but d’améliorer leurs performances. Ce serait le dopage à l’envers… » Depuis son premier éditorial en 1989, Olivier Coustere défend la nécessité d’un statut physique et sportif du transplanté et du dialysé, entre l’Olympe et le Para-Olympe.
Des passerelles entre l’hôpital et le stade
De l’hôpital aux Jeux, le pas peut inquiéter. De l’hôpital aux clubs sportifs avec des éducateurs sensibilisés, c’est plus facile. D’où la mise en place de partenariats avec les instances fédérales. Si cette nouvelle approche du sport-santé est imposée aux fédérations par le CNOSF, Olivier Coustere veille à ce qu’il ne s’agisse pas de juste publier une photo avec un petit article dans un magazine mais de créer de vrais programmes d’accueil des greffés et dialysés dans les clubs de ces fédérations. « Nous avons déjà noué des partenariats avec la Fédération Française d'Education Physique et Gymnastique Volontaire, EPMM-Sport pour Tous, la Fédération Française d’aviron, ... dans l’idée d’éduquer leurs éducateurs à l’atypisme ou plutôt à la normalité des transplantés et des dialysés pratiquant une activité physique. L’idée est d’élaborer une offre commune avec ces fédérations, proposée dès l’hôpital. » Les transplantés et dialysés, une fois remis debout, doivent pouvoir adhérer à une fédération qui leur plait.
Trans-Forme rencontre les chefs de service de toutes les unités de transplantation et de dialyse afin qu’ils prescrivent l’activité physique à leurs patients.
À force de conviction, d’enthousiasme, de militantisme, de temps… Trans-Forme a réussi un fantastique exploit : valider les bienfaits de l’activité physique et sportive pour remettre debout les greffés et dialysés. Une sacrée victoire !
LES MOMENTS CLÉS DE TRANS-FORME
1988 - Les Jeux Nationaux, c’est avant tout une famille qui se retrouve
Contrairement à ce que nous pourrions croire, les Jeux Nationaux ne sont pas le premier grand rendez-vous réunissant les transplantés et les dialysés autour d’épreuves sportives. Ils ont été créés 10 ans après les Jeux Mondiaux en 1988 à Fresnes. Très facilement associés à la notion de compétition, les JN peuvent faire peur à tort. Il y a 350 médailles pour 300 participants. « Les Jeux Nationaux sont le premier grand regroupement de l’hexagone. Les gens viennent en famille pour s’éclater. Ils ont vécu la même souffrance, le même combat, et ils ont le même désir de recouvrir une vie normale. Se retrouver autour de différentes épreuves leur permet de briser la glace. Lorsque les Jeux se terminent, ils sont souvent en larmes. » Si les adultes sont très pudiques, ce sont les enfants qui en parlent le mieux. « Des parents me disent : « Trans-Forme me l’a transformé. Il ne montrait pas sa cicatrice, se cachait à l’école. Il ne prenait plus ses médicaments. C’était un combat permanent… Maintenant, il est fier. Il met sa médaille autour du cou. » Une infirmière m’a raconté, qu’un gamin était revenu de dialyse et souriait aux autres. C’était la première fois qu’il s’exhibait ainsi. »
Jeunes, adultes, débutants ou confirmés, les Jeux Nationaux sont ouverts à tous les greffés ou dialysés et à leurs accompagnateurs. Durant ces 4 ou 5 jours de sport, de fêtes et de convivialité, ils peuvent participer à toutes les activités proposées : cyclisme, natation, tennis de table, athlétisme, canoë, golf, badminton, escalade, tir au pistolet, karting, bowling…
Rendez-vous à Narbonne pour les 27èmes Jeux Nationaux des Transplantés et Dialysés qui auront lieu du mercredi 20 au dimanche 24 mai 2020.
1992 - Les Jeux Nationaux d’Hiver
Comme les Jeux Olympiques, il y a ceux d’été et ceux d’hiver. C’est en 1992 à Termignon, en Savoie, qu’ont été organisés les premiers Jeux Nationaux d’Hiver. L’objectif reste toujours le même : sensibiliser à la réussite de la transplantation et à la nécessité des dons d’organes et des tissus. Au programme : ski de fond, biathlon, slalom spécial, slalom parallèle, slalom géant et super géant.
1994 - premier Symposium
« Exercice physique et transplantation cardiaque » fut le thème du premier symposium qui s’est tenu lors des Jeux Mondiaux d’Hiver de 1994, à Tignes. Ensuite, ils deviennent beaucoup dans l’esprit de Trans-Forme, avec comme angle « Dialysés et qualité de vie ». « Il est indiscutable que dans le chemin de la réadaptation la qualité de vie est primordiale. C’est pourquoi j’ai voulu réunir autour d’une même table ronde des praticiens et des para-praticiens. Des médecins dermatologues, sexologues, psychologues, kinésithérapeutes… La qualité de vie c’est ça ! On ne peut pas ignorer les besoins. On ne peut pas ignorer le risque de cancer qui est accru de 700% avec les médicaments. On ne peut pas ignorer le retour à l’emploi. On ne peut pas ignorer le statut d’handicapé. On ne peut pas ignorer les besoins de physiologie, kinésithérapie, etc. » Pour chacun des symposium un livre a été publié et envoyé aux autorités… S’il y a une certaine prise de conscience grâce à ce rendez-vous multidisciplinaire, Olivier Coustère veut aller encore plus loin. « J’aimerais lancer un prix annuel de qualité de vie. Un concours national dans toutes les unités de dialyse et de greffe. Le jury serait constitué de patients, philosophes, écrivains... et non des médecins afin d’éviter une course aux sponsoring. Chaque année, lors de ce symposium, nous remettrions une bourse. Toutes les données seraient colligées et mises en ligne sur un site afin d’avoir les meilleurs pratiques. »
1998 - La Course du Cœur
Elle a été créée en 1986 à l’initiative de journalistes-marathoniens qui cherchaient une cause. Trans-Forme l’organise vraiment depuis 1998. Cette passation s’est faite suite à la demande du directeur de la course. « Au début, je n’étais pas trop partant pour reprendre le flambeau. Je l’ai accepté parce que notre objet social est de promouvoir le succès de la greffe et la nécessité du don d’organes. Bien m’en a pris. Parce que même si le passage de témoin n’a pas été facile, la course a constamment évoluée. Sans compter qu’elle ne ressemble à aucune autre. » Elle est une formidable campagne de sensibilisation au don d’organes. Pendant 4 jours et 4 nuits, des équipes de 14 coureurs, dont une de transplantés (cœur, foie, rein, moelle osseuse…) se relaient non stop sur un parcours de 750 km, traversant au total plus de 200 communes. Avant que l’Agence de Biomédecine prenne en main la Journée National du Don et de la Greffe, la Course du Cœur était l’événement le plus médiatique sur le don d’organes. C’est en 2001-2002 que fut lancée l’opération des cœurs pour l’hôpital. « Quand on récupère 30 000 cœurs par édition, c’est 30 000 enfants et parents sensibilisés. Il n’y a pas plus belle image que de voir une équipe de greffés ayant bénéficié d’un don et qui va sur les routes de France et de Navarre pour récupérer ces cœurs en papier réalisés par les enfants pour les envoyer in fine aux unités de transplantation en guise d’encouragements aux greffés et à ceux en attente de greffe. La boucle est bouclée ! Pour les entreprises, c’est une opération extraordinaire, une course métaphorique de toutes les valeurs dans lesquelles elle se reconnaît ou voudrait se reconnaître : l’effort, la solidarité… »
Les programmes Trans-Forme
« Ça m’intéresse de m’occuper de ces choses-là dont personne ne se préoccupe ».
La féminisation de la pratique
« Depuis six ou sept ans, on se préoccupe des femmes au gouvernement. Le Ministère en charge des sports mène une politique pour développer la pratique féminine, valoriser le sport féminin, favoriser l’accès des femmes aux postes à responsabilités dans les institutions sportives… Nous, nous avons 2 femmes sur les 7 administrateurs. Moi, ce qui m’intéresse surtout c’est la pratique. »
Sachez que dans certains territoires de l’hexagone, la gente féminine a deux fois moins accès que les hommes à la pratique sportive. Le taux de licenciées féminines dans certaines fédérations sportives très populaires est seulement de 4%. Et seuls 20% des femmes qui font du sport le pratiquent dans un club. La transplantation vient compliquer un peu plus les choses. Certes il y a des problèmes de maternité, de grossesse, de retour de l’emploi qui est encore plus critique que pour les hommes. Surtout, « tous les médicaments que nous prenons ont des effets secondaires importants entraînant une mutation du corps, notamment un qui stimule fortement la pilosité. Beaucoup de femmes viennent à se raser la joue etc. » Il n’est donc pas évident de se retrouver en maillot de bain à la piscine au départ d’un 25m natation lorsque l’on est une femme qui a pris 25 kilos à cause de la cortisone, que l’on a le teint rougeaud et des poils… « Cela demande un apprentissage de l’acceptation de soi. C’est pourquoi nous avons un effort supplémentaire à faire afin que lors de nos manifestations, elles s’y sentent bien et qu’elles aient envie d’y participer. Chapeau pour celles qui n’hésitent pas ! »
Le pédiatrique nous le faisons déjà !
« Nous sommes avant-gardistes ! Cela fait déjà 9 ou 10 ans que nous nous en occupons. » L’année dernière, Trans-Forme a subventionné ce programme à hauteur de plus de 10 000€. Aux derniers Jeux Mondiaux des transplantés qui se sont déroulés à Newcastle en Angleterre, 7 enfants sur les 44 compétiteurs étaient au rendez-vous. Devant cette très belle participation, Olivier Coustère regrette un peu que ce soit toujours un peu les mêmes unités pédiatriques que l’on retrouve. Et pourtant ce n’est pas faute de se déplacer. « La encore nous sommes dans un programme qui dépend des infirmières, assistantes sociales… des femmes très demandées et occupées. Nous devons multiplier les hôpitaux avec lesquels nous sommes en contact. Et je vais profiter des Jeux Nationaux de Narbonne (11) pour faire le tour de toutes les unités de l’Occitanie pour aux Jeux de l’année prochaine de nouveaux enfants viennent. » L’objectif est toujours le même : sensibiliser le grand public à la réussite de la transplantation et à la nécessité du don d’organe, via l’image positive et pleine d’espoir que représente la pratique de l’activité physique. D’où la diversité d’événements et de projets, tels que les week-ends voile, que Trans-Forme subventionne entièrement ou en partie. « En prenant les gamins, nous voulons leur faire découvrir qu’il existe un autre terrain de jeu que le lit d’hôpital, et de leur permettre de couper le cordon ombilical familial qui est très fort, de se retrouver entre eux et surtout d’être libre. Déjà, en temps normal, les parents ont du mal à les laisser dans un centre de vacances. Avec leur traitement, c’est encore plus difficile. »
Vers les seniors dialysés…
Sachant que la moyenne d’âge des dialysés est de 71 ans et qu’aucune offre ne leur est proposée, Trans-Forme a décidé de s’attaquer à ce problème. D’autant plus qu’on les met dans les mouroirs. « C’est pourquoi, nous avons lancé en Ile de France, les fameuses enquêtes sur les dialysés et l’activité physique. Une fois de plus, les moyens qui commencent à être mis en place dans les unités de dialyses sont encore à la seule initiative bénévole de praticiens et d’infirmières. » Une belle décision quand on sait qu’un patient âgé en meilleur forme et en meilleure santé qui commence un traitement par dialyse se sent au moins aussi bien que ceux un peu plus jeunes. « Devant les appels d’offres de nos interlocuteurs, nous allons nous y intéresser de plus près. »
L’éducation thérapeutique
C’est quoi ? Faire observer davantage. Faire adhérer les patients encore plus, les responsabiliser, ou encore de leur faire comprendre l’enjeu, à l’aide de posters. Le but ? De parler du ou des problèmes en offrant des parades. Et si la personne souhaite approfondir la question, elle est invitée à en discuter avec son médecin. « Notre but n’est pas d’être anxiogène mais il ne faut pas laisser le silence s’installer, d’attendre que le médecin ait le temps et la compétence pour aborder le sujet.
La prévention de l’automédication
Personne ne fait le lien entre la qualité de vie et l’auto-information ou au contraire le risque de l’automédication. « Je pense que ce programme ambitieux n’est pas forcement gagné d’avance. Nous sommes seuls pour le réaliser. Pas grand monde voit un enjeu stratégique. Et pourtant… » Comme tout à chacun, nous essayons tous d’être au top de notre forme, hiver comme été, ainsi qu’aux intersaisons… Bref ! Toute l’année. Avec tous les spots publicitaires vendant les mérites de tel ou tel produit, de telle ou telle plante, l’automédication est une pratique grandissante. Des milliers de médicaments sont accessibles sans ordonnance. Une réelle avancée pour certains progrès. Pour d’autres, cela peut être un grave danger. « L’interaction médicamenteuse existe et l’on s’en fiche. Nous sommes dans un désert d’incompétence, de consulting et surtout dans le silence ! »
Docteur Christian D'Auzac, néphrologue
« Olivier Coustère est un de ceux qui ont permis de réaliser le sport du dialysé et du transplanté »
Avec Olivier Coustere, nous nous sommes rencontrés à Innsbruck en 1987. Nous avons mis quatre ans pour construire quelque chose de pérenne. À cette époque, on n’arrivait pas à transplanter plus de 800 personnes par an. Il y avait un nombre considérable de laissés pour compte et qui en plus mouraient. Il s’agissait donc de vivre malgré la greffe, les corticoïdes ou les immunosuppresseurs qui rendaient bien malade. Sans compter que seuls 20% des greffés, qui allaient très bien, arrivaient à reprendre le travail. La première façon de vivre était de faire vivre son corps.
Dans ce sens, nous devions prouver que l’activité physique faisait du bien. Il n’existait rien en terme de médecine du sport. Comme l’avait écrit l’un des créateurs de la médecine du Tour de France, nous allions « vers la permissivité du sport pour les malades. » Il fallait donc un fou qui accepte d’accompagner la folie d’Olivier et de quelques-uns qui voulaient s’essayer au sport. Ce que je fis. Néphrologue, réanimateur et transplanteur, il fallait que j’apprenne la médecine du sport. Nous nous sommes donc entourés de spécialistes, de médecins du sport et acoquinés avec des équipes universitaires de médecine de la fonctionnalité.
C’est ainsi qu’est née une médecine du sport pour dialysés et transplantés, en élaborant certains prérequis médicaux. Voulant que tout le monde pratique de l’activité physique, je demandais un test d’effort, des tests spécifiques pour les transplantés cardiaques et les hépatiques. Quelques examens de façon à n’avoir aucun accident lors des Jeux Nationaux et Mondiaux. Très vite, l’équipe française médicale était connue pour ne jamais avoir eu d’accident, contrairement à d’autres pays. Cette permissivité est donc devenue petit à petit un fait existant.
Tout ceci grâce à la combativité quotidienne, surtout en terme de subventions, d’un président d’association au prix d’un certain nombre de problèmes que ce soit sur le plan familial, santé ou professionnel. Depuis le début, même avant la création de l’association Trans-Forme, Olivier s’est donné corps et âme, battu bec et ongles, pour faire avancer les choses. À une certaine période, pour obtenir des subventions, il fallait voir avec les aides aux handicapés. Nous ne voulions pas parce que le handicap est une amputation fixée mais stable. Or, le dialysé comme le greffé c’est exactement le contraire. Il n’y a aucune amputation. Vous semblez comme tout le monde sauf qu’à tout bout de champ, vous pouvez mourir suite à des complications d’immunosuppression et donc des infections graves, voir mortelles. Et de l’autre côté, vous risquez de décéder à cause d’une immunosuppression insuffisante, c’est-à-dire le rejet et donc le retour à la case départ. Pour ce qui concerne les reins, la case départ est la dialyse. Pour les autres transplantations d’organes (foie, poumon, cœur), c’est le décès ou la re-transplantation dont on sait que cela ne fonctionne pas toujours bien.
À telle enseigne, qu’il fallait également faire progresser la greffe d’organes, le deuxième objet de l’association. La meilleure manière de démontrer que la greffe marchait, que les greffés et dialysés n’étaient pas des zombies mais de vrais êtres en cours de réhabilitation, c’était de s’exhiber en bonne santé et de faire du sport afin de montrer que le corps est à nouveau capable de travailler. Aujourd’hui, toutes ces notions de sport du dialysé, du transplanté, du malade… sont quasiment un chapitre de la médecine.
Merci aux greffés qui se mobilisent pour la cause, aux donneurs anonymes et solidaires, ainsi qu’aux familles qui ont perdu un être cher qui n’ont et n’auront pas dit non au don (encore 33% de refus) et dont le décès n’est et ne sera pas vain…